« Did the Israeli Army Wage a Jewish Jihad in Gaza? | Israel is addicted to war » |
Karine Mac Allister
L’état d’Israël a été créé en 1948. Israël est né du mouvement sioniste qui voulait un état pour les juifs après les pogroms et la Deuxième Guerre Mondiale. À cette époque, des Musulmans, des Chrétiens et des Juifs cohabitaient en Palestine. La Société des Nations (ancêtre des Nations Unies) a donné à la Grande-Bretagne un mandat ayant deux objectifs difficiles à concilier : (1) réaliser le droit à l’autodétermination des Palestiniens et (2) créer un « foyer national » pour les juifs en Palestine.
En 1947, pris avec ce dilemme et face aux violences croissantes sur le terrain, la Grande-Bretagne a demandé aux Nations Unies de décider de la question de la Palestine. Les Nations Unies ont donc recommandé de diviser la Palestine en deux: un état juif et un état arabe, avec un statut international pour Jérusalem.
Les arabes ont refusé la recommandation, car ils perdaient 56% de leur territoire aux mains des juifs qui représentaient à l’époque moins d’un tiers de la population. Les hostilités ont éclaté et se sont aggravées après qu’Israël aie déclaré son indépendance le 14 mai 1948. La Grande-Bretagne s’est alors retirée, et le projet de Partition s’est éteint. Pour les Israéliens, c’est la guerre d’indépendance alors que pour les Palestiniens, c’est la Nakba, la catastrophe soulignant leur déracinement, dépossession et déplacement. Plus de 500 villages palestiniens ont été détruits et plus de 700 000 Palestiniens sont devenus réfugiés (85% de la population vivant sur le territoire de l’État juif). À la fin de la guerre, Israël avait capturé plus de terres, s’étendant sur 78% du territoire de la Palestine.
En juin 1967, durant la guerre des Six-Jours entre Israël et les États Arabes, plus de 400,000 Palestiniens ont été déplacés de force par l’armée israélienne. Israël n’a pas annexé les 22% mais les a occupés militairement. Donc, depuis plus de 40 ans, Israël occupe avec son armée la Cisjordanie et la Bande de Gaza, qui était auparavant sous contrôle Jordanien et Égyptien respectivement, mais dont la souveraineté appartient aux Palestiniens.
Dans le but de créer un État avec une majorité juive sur tout le territoire de la Palestine, plusieurs plans ont été élaborés par Israël pour transférer les Palestiniens hors du territoire de la Bande de Gaza, de la Cisjordanie et d’Israël, où presque 20% de la population est Palestinienne.
Depuis 1948, des millions de Palestiniens ont été déplacés de force et dépossédés de leurs maisons et de leurs terres. Ils sont aujourd’hui des réfugiés ou des déplacés internes vivant à l’intérieur ou à l’extérieur de la Palestine originelle. Ils ne peuvent pas retourner sur leurs terres et dans leurs maisons car ils ne sont pas juifs et Israël ne leur reconnaît pas le droit de retour malgré la position contraire des Nations Unies et du droit international.
Ces déplacements forcés continuent depuis 60 ans. Encore aujourd’hui, les Palestiniens sont déplacés. Israël vole leurs terres et leurs maisons pour les céder à des colons juifs, pour construire le Mur, pour mener des opérations militaires ou simplement pour s’approprier le territoire.
Aujourd’hui, il y a environ 7 millions de réfugiés Palestiniens et 400,000 déplacés internes sur une population totale d’environ 10 millions, soit 70% de la population palestinienne.
Il y a près de 4 millions de Palestiniens qui vivent dans le territoire Palestinien occupé formé de deux territoires géographiquement séparés : la bande de Gaza et la Cisjordanie. Les Palestiniens en Cisjordanie, incluant Jérusalem Est, et dans la Bande de Gaza vivent sous occupation militaire israélienne depuis plus de 40 ans. L’occupation militaire est le contrôle par la force de la vie des Palestiniens et de leur territoire.
En Cisjordanie, près d’un demi-million de colons juifs habitent illégalement sur des terres qui ont été volées à des Palestiniens. Israël fait de la discrimination et leur accorde des privilèges fiscaux ou sociaux. Le but d’Israël? S’approprier les terres des Palestiniens en les refoulant sur un territoire qui ne cesse de rétrécir. Sur les terres palestiniennes ainsi acquises, Israël installe sa population juive. Ce transfert de population est illégal. Pour cette raison, on dit que l’occupation israélienne est aussi du colonialisme. En d’autres termes, Israël se construit sur la Palestine en dépossédant les Palestiniens.
Les Palestiniens sont aussi victimes d’un régime d’apartheid, un crime contre l’humanité en droit international. L’apartheid est un système institutionnalisé de discriminations violant les droits fondamentaux et ayant pour but la domination et l’oppression systématique d’un groupe racial sur un autre. Dans le territoire palestinien occupé par exemple, il existe des routes pour les colons juifs et des routes pour les Palestiniens. À l’intérieur d’un même territoire, des lois s’appliquent aux colons juifs alors que d’autres s’appliquent aux Palestiniens. Israël applique sa loi, mais n’a pas le droit de faire cela.
Les gens qui habitent la bande de Gaza sont en majorité des descendants de ceux qui ont été chassés d’Israël il y a 60 ans. La Bande de Gaza est un tout petit territoire, une bande de terre de 10 km de large par 40 km de long (360km2) où s’entassent une population de 1.5 millions de personnes. C’est l’un des endroits les plus densément peuplé au monde.
Israël a construit un Mur autour de la bande de Gaza durant le processus de paix dans les années 1990, faisant de Gaza une immense prison à ciel ouvert. On ne peut ni entrer ni sortir de la bande de Gaza sans la permission d’Israël. La population de Gaza est bombardée par l’armée israélienne et n’a nulle part où fuir et trouver refuge, car les frontières sont fermées.
Depuis 2002, Israël construit également un Mur en Cisjordanie, un mur qui a été jugé illégal par la Cour Internationale de Justice car il ne suit pas la ligne de démarcation entre la Cisjordanie et Israël. En fait, Israël transgresse illégalement cette ligne diminuant ainsi le territoire disponible pour les Palestiniens et ce, pour faire de la place à ses colons juifs. La construction du Mur continue en Cisjordanie, défigurant le territoire et le morcelant en ghettos déconnectés. Israël impose un système de permis qu’il utilise à son gré contre les Palestiniens. Le Mur et son régime séparent les Palestiniens de leurs familles et amis, de leurs terres, de leurs emplois, écoles et soins de santé. Il y a également plus de 600 checkpoints (points de contrôle de l’armée israélienne) et obstacles à la liberté de circulation à travers le territoire de la Cisjordanie. Ce sont des « points de contrôle » tenus par l’armée israélienne où les Palestiniens doivent attendre des heures pour passer, rendant chaque déplacement très difficile. Il n’est pas rare de voir des soldats abuser verbalement et physiquement des Palestiniens aux checkpoints dans le but de les humilier.
En 2005, incapable d’installer une population juive importante au sein des Palestiniens à Gaza, Israël, a retiré ses colonies juives de la Bande de Gaza pour des raisons démographiques et stratégiques. En échange, Israël a reçu l’assurance du Président George Bush qu’Israël n’aurait pas à quitter ses principales colonies en Cisjordanie et que les États-Unis reconnaîtraient la « nouvelle réalité sur le terrain». Cette décolonisation de la Bande de Gaza n’a cependant pas mis fin à l’occupation militaire; elle signifie plutôt un redéploiement de l’armée israélienne autour de la Bande de Gaza et un durcissement de la politique de fermeture du territoire.
Depuis l’été 2007, Israël impose un siège sur les habitants de la bande de Gaza, restreignant la liberté de mouvement et l’entrée de nourriture, de médicaments, de gaz, de pétrole et de matériaux de construction. Le siège permet à peine aux Palestiniens de survivre. En assiégeant Gaza, Israël, avec le support des États-Unis, de l’Union Européenne et du Canada, provoque une crise humanitaire. C’est une forme de punition collective, illégale en droit international, dont sont victimes tous les Palestiniens de Gaza. Quel est le crime des Palestiniens? Est-ce le fait d’habiter un territoire où le Hamas est au pouvoir, après avoir remporté de manière démocratique les élections en janvier 2006? C’est la première fois dans l’histoire qu’un peuple occupé est puni pour avoir voté démocratiquement.
Le Hamas est un groupe de résistance Palestinien armé. Il résiste contre le régime d’occupation et de colonisation israélienne. Cette résistance est légale et légitime. Comme la plupart des groupes de résistance palestiniens dans la Bande de Gaza, le Hamas lance des roquettes pour montrer à Israël que les Palestiniens refusent d’être conquis, soumis et humiliés. Les roquettes et les attaques suicides des groupes militants Palestiniens, dont le Hamas, sont illégales en droit humanitaire international, car ces méthodes contreviennent au principe de non-discrimination qui requiert une distinction stricte entre civil et combattant. Bien que le Hamas résiste à l’occupation israélienne, il accepte de vivre côte à côte avec l’État d’Israël et accepte donc l’idée de deux états : un palestinien et l’autre israélien. Cependant, les propositions du Hamas n’ont même jamais été considérées sérieusement par Israël et la communauté internationale.
On décrit souvent les partis en conflit comme étant des partis avec des capacités et des responsabilités égales. C’est une grave erreur. Il y a un occupé et un occupant. Un colonisateur et un colonisé. Le colonisateur (Israël) a l’une des armées les plus puissantes au monde, équipée d’armes à la fine pointe de la technologie. Pour sa part, les groupes de résistance palestinienne, dont le Hamas, disposent de roquettes artisanales. Celles-ci ont un effet non discriminé, visent des populations civiles en Israël et sont donc interdites en droit international. Mais les moyens de résistance des Palestiniens sont très limités compte tenu de la situation des Palestiniens à Gaza.
Les médias disent souvent : « le Hamas a brisé la trêve et n’a pas respecté les conditions du cessez-le-feu de juin à novembre 2008 ». En fait, d’autres groupes de résistance, tel le Jihad islamique seraient responsables des roquettes lancées pendant la trêve. Israël aurait sauté sur l’occasion pour accuser et attaquer le Hamas en novembre, brisant ainsi la trêve et provoquant la réplique du Hamas.
On entend aussi souvent: « Israël a le droit à l’autodéfense ». Mais Israël n’exerce pas son droit à l’autodéfense lorsqu’il attaque la Bande de Gaza. Israël a détruit des écoles, des mosquées, des maisons, des établissements appartenant au gouvernement et aux Nations Unies. Le droit à l’autodéfense peut être invoqué sous l’article 51 de la Charte des Nations Unies lorsqu’il y a une attaque mettant en danger la survie de l’État. Les tirs de roquettes du Hamas ne mettent pas en danger la survie de l’État d’Israël. Si tel avait été le cas, Israël aurait réagi dès le début des tirs de roquettes en 2005. Israël commet donc une agression, une action illégale en droit international.
Israël n’attaque pas seulement les positions du Hamas. Les attaques d’Israël dans la bande de Gaza ont jusqu’à présent causé la mort de plus de 1300 personnes et fait plus de 5000 blessés. Plus de 50% des victimes sont des civils, surtout des femmes et des enfants. Plus de 4,000 maisons sont complètement détruites et 17,000 le sont partiellement. Bref, des milliers de personnes n’ont plus de foyer.
Israël a l’approbation du gouvernement des États-Unis et du Canada pour commettre toutes ces atrocités probablement à cause du puissant lobby pro israélien sur la politique et l’économie aux États-Unis et au Canada. Le lobby pro Israélien a pour but de faire valoir les intérêts de l’État d’Israël auprès des gouvernements nord-américains et européens en présentant leur version du conflit. Pour réaliser ce projet, le lobby explique le conflit Israélo-palestinien comme faisant partie d’une guerre globale contre le terrorisme, tentant ainsi de démontrer que les groupes de résistance palestiniens sont des terroristes, comme al Quaïda. Le lobby pro Israélien demande également un support inconditionnel des grandes puissances, prétextant qu’Israël est la seule démocratie « occidentale » au Moyen-Orient tout comme l’Europe et l’Amérique du Nord; leur seule alliée fiable donc. De plus, le lobby tente de démontrer que toute critique d’Israël est une attaque contre le peuple juif, et non contre les actions d’un gouvernement. Ainsi, la plupart des critiques d’Israël sont accusés d’antisémitisme ou de vouloir détruire l’État juif.
Beaucoup de juifs, en Israël et partout dans le monde, sont contre les actions qu’Israël pose à l’égard des Palestiniens et refusent d’être associés à l’État d’Israël. Plusieurs Israéliens, se perçoivent comme les victimes. Pour eux, les attaques des Palestiniens visent à les détruire et non pas à se libérer. Ils conçoivent les actions du gouvernement israélien comme défensives et soutiennent, malgré les pertes civiles, que l’attaque contre Gaza est nécessaire. Cette position est renforcée par le service militaire obligatoire, qui contribue à cimenter l’identité israélienne. Depuis la seconde intifada en 2001, la relation soldat-civil/combattant est pour une majorité d’Israéliens le seul contact direct établi avec des Palestiniens.
Supporter le droit à l’autodétermination du peuple Palestinien – le droit de décider de leur destinée– ne veut pas dire supporter toutes les actions des groupes armés palestiniens. Ça veut dire supporter le droit des Palestiniens à vivre libre, sans occupation militaire, sans colonisation et sans apartheid; le droit de vivre dans leur maison, sur leur terre, dans un pays.
Malgré les guerres et sa supériorité, Israël n’a jamais réussi à obtenir la paix. Cela prouve bien que, contrairement à ce qui est communément affirmé en Israël, les Palestiniens ne comprennent pas la force. Il serait grand temps qu’Israël reconnaisse qu’il a dépossédé le peuple palestinien et qu’un accord soit négocié en se basant sur le droit international, chose qui n’a jamais été faite dans l’histoire du conflit. Les droits des deux peuples doivent être reconnus pour leur permette de vivre ensemble, dans un État ou une confédération où tous seront égaux; où il n’y aura plus d’occupant et d’occupé et de colonisateur et de colonisé. En ce sens, Israël a beaucoup plus à faire pour agir conformément au droit international que les Palestiniens.
Une telle situation requiert un changement des rapports de force sur la scène internationale. Des mesures de pression doivent être mises sur les partis, en particulier sur l’establishment israélien. Les responsables de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité doivent être tenus responsables. Comme l’a affirmé le Secrétaire-Général des Nations Unies, Ban Ki-moon, après les attaques contre les installations des Nations Unies, où 700 civils se réfugiaient,
“It is an outrageous and totally unacceptable attack against the United Nations. I have protested many times, and am today protesting in the strongest terms, and am condemning it. I have asked for a full investigation and to make those responsible people accountable.”
Finalement, il faut que les gouvernements du monde parlent au Hamas qui, rappelons-le a été élu démocratiquement. C’est une erreur diplomatique grave que de tenter de trouver une solution en isolant et punissant le Hamas, alors qu’il a le soutien d’une grande partie de la population. Un cessez le feu a été déclaré. Il est peu probable qu’il tienne compte tenu de la dynamique actuelle.
Encore une fois c’est la communauté internationale qui va payer pour tous les dommages causés par les bombardements israéliens. Quand allons-nous affronter les véritables causes de ce conflit (occupation et colonisation)? A quand le prochain massacre en Cisjordanie ou à Gaza? Rien ne sera réglé au Proche-Orient sans une solution juste basée sur le droit international. Ce sera la meilleure garantie de sécurité pour les Israéliens, et ce ne serait que justice pour les Palestiniens qui attendent depuis 60 ans.
Karine Mac Allister était coordinatrice pour le plaidoyer légal (coordinator for legal advocacy) à BADIL Centre de Ressource pour la Résidence Palestinienne et les Droits des Refugiés (Resource Center for Palestinian Residency & Refugee Rights) et est présentement étudiante en doctorat en droit international à l’Université de Montréal.
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Source:
http://www.tadamon.ca/post/2970